lundi, mars 03, 2008

MAI 68 "UNE RÉVOLUTION JUIVE" ? (2)

Cette éducation leur a inculqué l'image d'une société "absolument mauvaise" qu'on ne peut améliorer et qu'il fallait subvertir : " L'histoire est un long périple qui va d'un âge d'or (le communisme primitif) à un autre âge d'or (la société sans classe), à travers une vallée de larmes (la lutte de classes)." Il fallait donc se battre pour "une société nouvelle d'où le mal était extirpé". Cette perception de la société et du changement social, donnée par le père, se structure de la même façon que la pensée messianique religieuse.
M. Daniel Linderberg a renchéri en liant ce phénomène à une culture laïque du messianisme des organisations communistes (se référant au Bund - mouvement juif révolutionnaire marxiste anti-sioniste), culture insérée dans un cadre d'analyses du mouvement ouvrier moderne.
Cette attention particulière aux événements de mai s'explique également par un "besoin de justice" fort chez les juifs, à cause de la Shoa, selon M. René Frydman. Les parents de cette génération, souvent d'anciens résistants de la MOI (main d'oeuvre immigrée, organisation regroupant les étrangers, pour la plupart juifs, dans la résistance communiste) ont laissé ce besoin de justice comme héritage. La nécessité de continuer leur combat a poussé les jeunes juifs à être "les premiers sensibilisés" aux phénomènes comme la guerre d'Algérie, le Viet-nam et le mouvement de mai.
M. Benjamin Stora a soutenu une thèse complémentaire : l'engagement de mai 68 traduisait une "volonté d'insertion dans la société française". Confrontés à une société bloquée, antisémite, véritable "carcan", ces jeunes, en se mettant en mouvement et en s'insérant, voulaient "assumer au grand jour le fait d'être juif". Le slogan "Nous sommes tous des juifs allemands" en fut l'expression la plus parfaite. (à suivre)

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