dimanche, avril 27, 2008

LE PEN, LA BRETAGNE ET SARKOZY

La revue "Bretons" ayant posé une bonne question à Le Pen ("Pourquoi, vous qui êtes Breton, avez-vous été si peu été suivi en Bretagne" ?) sans obtenir de réponse, l'entretien ayant dévié sur un "détail", je vais m'efforcer d'y répondre, sa fille, Marine Le Pen, ayant semble-t-il, des ambitions présidentielles, avec quelques autres qui liront ce post avec intérêt (notamment Ségolène Royal, François Bayrou, Bertrand Delanoë ou Dominique de Villepin).
La Bretagne était dominée par le catholicisme et un grand quotidien, Ouest-France, d'obédience inévitablement catholique. Ce qui, politiquement, a donné la "démocratie chrétienne", à savoir, au lendemain de la guerre, ce fameux MRP (Mouvement Républicain Populaire... qui aujourd'hui fait sans doute rêver François Bayrou !). Un autre courant très fort a vu le jour : le gaullisme. A la Libération, ce catholicisme politique s'est donc scindé en deux fractions : anti-gaulliste et gaulliste. La première s'est alliée aux socialistes et aux radicaux pour faire la IVe République, l'autre a suivi le Général dans son opposition à la IVe. Sur la côte (les ports) et dans les grandes villes il y avait une gauche qui se partageait entre communistes et socialistes SFIO, dominée par les enseignants, héritiers du long combat mené sous la 3e République contre l'école "confessionnelle". Que restait-il pour l'extrême-droite ? Très peu. Des nostalgiques de l'Empire, des anciens combattants revenus de la guerre d'Indochine, des partisans de l'Algérie française, sans oublier une aile conservatrice dans l'Église très remontée contre le concile Vatican II (1962), trop "moderniste" aux yeux des traditionnalistes. Mais ce qui donna un coup de fouet au "lepénisme" dans les banlieues à forte concentration immigrée, notamment en région parisienne, ne put se produire en Bretagne du fait de l'absence précisément... d'immigrés ! Pour schématiser, l'agriculture est restée entre les mains des paysans bretons, tout comme la pêche, l'autre secteur dynamique, demeure essentiellement familial. En l'absence de grosses industries, la Bretagne n'a pas attiré de main d'oeuvre "étrangère", sauf dans le bâtiment où sont venus récemment des Turcs, et quelques Maghrébins, quasiment pas d'Africains Noirs, au point que la Région Bretagne n'a pas tellement bougé d'un point de vue ethnique. En revanche, là où elle a fortement évolué, sous l'influence de l'Église précisément, c'est sur le plan politique où finalement elle s'est, au fil des ans, "socialisée" du fait que les cadres des mouvements agricoles, syndicaux et autres, ont découvert le "socialisme" à la Rocard, et l'Europe à la Delors. Ces deux politiciens ont été littéralement propulsés par la hiérarchie catholique, et le quotidien Ouest-France en a fait "les deux grands hommes de la Bretagne" (sic) même s'ils n'ont rien de Breton, ni l'un ni l'autre, ce qui prouve bien qu'il s'agit d'un parrainage néo-clérical - tandis que le malheureux Le Pen, surnommé le Menhir, restait en rade à la Trinité-sur-mer ou venait s'ébrouer en région parisienne ! L'Église, en effet, après s'être fourvoyée dans les bras du Maréchal Pétain, redouta, en 1945-46, de se jeter... dans les bras du Général, d'autant que le parti communiste, alors hyper-stalinien, et auréolé des grandes victoires de l'URSS sur l'Allemagne nazie, attirait les jeunes prêtres qui s'engageaient dans le "parti" (avec la foi du croyant), ou dans la CGT, à l'appel du Christ, celui qui, en fait, expliquaient-ils à leurs nouveaux camarades de parti, avait été le "premier communiste" (sic) ! Le PC ayant disparu, le PS a récupéré tous ces militants chrétiens-sociaux, un peu nostalgiques quand même de l'époque "communiste", d'où leur vocabulaire teinté de gauchisme. Reste que le parti socialiste en Bretagne est depuis belle lurette réformiste, et que ses dirigeants relèvent plutôt du centre-gauche. Considérant que la Bretagne était désavantagée dans le cadre de l'État centralisateur parisien (ah, le méchant !), les dirigeants bretons ont joué à fond la carte "européenne", sacrifiant ainsi les atouts de la façade maritime, les technocrates de Bruxelles avantageant naturellement les grands ports de la Mer du Nord (Anvers, Rotterdam...). Ce que regrettait Éric Tabarly, le grand marin de l'Atlantique. En outre, les pays de l'Est ayant rejoint l'Europe, l'axe central s'est déplacé du Rhin-Rhône vers le Danube, au détriment naturellement de notre chère Bretagne. (à suivre)

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